Il est une règle en matière d’obligation alimentaire, d’origine jurisprudentielle, selon laquelle les aliments ne « s’arréragent pas ».
Selon cette règle, le créancier d’une obligation alimentaire ne peut prétendre au paiement des sommes dont l’origine est antérieure à sa demande en justice.
Le principe sous jacent adopté par la Cour de cassation tient à la nature même de l’obligation alimentaire et de son caractère « indispensable » et même vital.
Ainsi, si le créancier a réussi à survivre sans le paiement, il n’est plus recevable à solliciter ledit paiement pour ces sommes, l’obligation ne perdure que les sommes échues après la demande.
Toutefois, ce principe ne s’applique pas en matière de contribution alimentaire vis-à-vis des enfants, l’exception étant régulièrement rappelée par les juges du Quai de l’Horloge (1ère chambre civile, 12 mai 2004, n° 02.17-441 ou 1ère chambre civile, 23 janvier 2007, n° 06.10-268).
Aussi, la demande d’aliments au bénéfice d’un enfant semble ne trouver aucune limite et pouvoir être faite sur une période particulièrement longue.
C’est le cas qui s’est présenté à la Cour de cassation, dont la 1ère chambre civile a rendu un arrêt le 26 mai 2016 (n° 15.17-993).
Dans cette affaire, suite à la reconnaissance de paternité d’un enfant, la mère a sollicité la condamnation du père au paiement d’une contribution à son éducation et à son entretien à compter de la naissance de l’enfant et jusqu’à sa majorité, soit une période de 18 ans.
La Cour d’Appel de Poitiers saisie de l’affaire a condamné le père au paiement d’une somme de 350€ par mois (outre indexation) depuis la naissance de l’enfant (soit un total, hors indexation de 75.600€) en retenant que l’adage selon lequel les aliments ne s’arréragent pas ne s’appliquait pas au cas d’espèce.
Saisie sur le pourvoi formé par le père, la Cour de cassation casse la décision de la Cour d’Appel au motif que « si la règle « aliments ne s’arréragent pas » ne s’applique pas à l’obligation d’entretien, l’action en paiement d’une contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant est soumise à la prescription quinquennale prévue par [l’article 2224 du Code civil] ».
Ce faisant, la Cour de cassation rappelle la prédominance des règles de prescription, y compris sur les principes jurisprudentiels dégagés en matière d’aliments dus aux enfants et limite la durée sur laquelle les aliments peuvent être demandés à 5 ans, durée de la prescription de droit commun.
Ainsi, s’il reste possible de solliciter la condamnation du débiteur de l’obligation d’aliment au profit de l’enfant sur une période antérieure à la demande en Justice, il n’en reste pas moins que l’obligation se heurte, comme chacune, aux règles de la prescription de 5 ans.
En tout état de cause, tenant la nature même de l’obligation alimentaire, il reste toujours conseillé d’agir dans les meilleurs délais afin d’assurer la sauvegarde de ses droits.